![]() |
![]() |
Vins de Savoie par Andrea Petrini
Connaissez-vous les vins de Savoie? Les vrais. Pas les infâmes piquettes aigrelettes qu'on nous a longtemps servies au bistroquet du coin. Pour ceux qui ne s'en
sont pas aperçus, la Savoie est désormais une région viticole à part entière. Avec ses petits grands crus et ses vignerons phares. Ceux qui ont redoré le blason de l'appellation. Finis les blancs passe-partout, relégués au rituel
de l'apéro entre une pistache et deux cacahuètes. Finies aussi ces vinasses infectes que l'on fourguait, d'auberge en cantine "discount", à l'impavide dîneur pressé de noyer les chagrins fromagers de fondues et raclettes
industriellement débitées. Depuis une quinzaine d'années, des jeunes et moins jeunes gens audacieux ont renversé la vapeur et remis à l'ordre du jour la question de la qualité. Produire moins pour produire mieux. Tirer de chaque
cépage la quintessence de son identité. Investir dans le futur et parier sur la longévité. Qu'il s'appellent Michel Grisard, Louis Magnin, Jacky Quenard et autres Trosset, la Savoie compte actuellement sur un noyau dur de vignerons
qui en sont devenus les ambassadeurs attitrés sur les tables des meilleurs restaurants. Prenez Noël Dupasquier. Le Roi de Marestel. Sa Roussette l'a consacré parmi les rénovateurs de l'appellation. Mais ne cherchez pas ses
flacons dans la plupart des restaurants de Lyon: il n'y en a presque pas. Fainéantise de sommelier. Manque de professionnalisme et de curiosité, dira-t-on. Pourtant la Roussette de Dupasquier est une petite merveille. Si la
Mondeuse descend de la Syrah et le Chignin-Bergeron de la Roussanne, les origines de la Roussette Marestel remontent au 13ème siècle lorsque le Duc de Mareste, de retour d'une croisade à Chypre où il découvrit le cépage, décida de
le planter dans ses terres. A peu près les mêmes qui déterminent aujourd'hui les limites de l'appellation à l'ouest du lac de Bourget, entre Lyon et Chambéry, au pied du massif de la Charraz. La quarantaine bien portée, Noël
Dupasquier sait ce qu'il veut. Faire un vin de grandissime qualité. Pas question de lésiner sur les moyens. Alors les vendanges sont manuelles, les fermentations extrêmement poussées dans des petites unités, histoire de mieux
contrôler la température. "Les gens prennent la Roussette pour un vin de soif, idéal pour une consommation immédiate. Alors que le cépage Altesse permet d'atteindre, contre toute attente, une longévité exceptionnelle. Il
m'arrive d'ouvrir des bouteilles des cinq, dix, voire quinze derniers millésimes et de constater que mes Roussette n'ont pas cessé d'évoluer". Domaine Noël Dupasquier, Aimavigne, 73170 Jongieux |