L'été au "Concert"

Rencontre avec Franck-Emmanuel Comte
directeur artistique du Concert de l'Hostel Dieu

Propos recueillis par Catherine Férey

Avant de vous suivre au cours des festivals de l'été, pouvez-vous présenter Le Concert de l'Hostel Dieu à nos lecteurs?
L'ensemble a été créé en 1992. Au départ, d'ailleurs, le projet émanait des médecins de l'Hôtel-Dieu, qui m'avaient demandé de créer une Saison, dans la chapelle de l'Hôtel-Dieu. Cette première manifestation proposait un programme baroque, classique, romantique et contemporain.
En 1994, l'Ensemble quitte l'Hôtel-Dieu, la chapelle n'étant plus aux normes pour recevoir du public. Le président de l'association de l'Hôtel-Dieu décède la même année. Il n'y avait plus de raison de rester dans cet édifice. La Saison se transforme alors et devient Le Concert de L'Hostel Dieu, ensemble dédié à la musique baroque.

Pourquoi vous êtes-vous particulièrement consacré à cette musique?
Il n'y avait pas d'ensemble baroque à Lyon à cette époque, tout d'abord. De plus, pour nous inscrire dans la durée, il était indispensable de nous professionnaliser et, pour ce faire, il était cohérent de nous spécialiser dans une musique qui nous était particulièrement chère. L'orchestre a été formé le premier, les solistes sont arrivés ensuite puis, en 1996, logiquement, le chœur.
Nous jouons tous sur instruments anciens et les solistes qui se produisent forment une sorte de sérail. L'équipe se connaît bien et entretient une complicité qui rend le travail plus subtil, plus homogène.

Depuis 1997, nous avons réouvert notre répertoire à la musique classique et pré-romantique, toujours sur instruments contemporains, c'est une exigence de l'Ensemble. Elle entre dans notre philosophie, dans une démarche plus fondamentale sur le son, les partitions et le geste du compositeur. Nous avons constamment le souci de l'authenticité interprétative. Je pourrais même parler d'une démarche archéologique indispensable pour rendre le répertoire plus vivant.
Ponctuellement nous interprétons de la musique médiévale ou renaissance.
Les trois quarts de notre répertoire couvrent les 17e et au tout début du 19e siècle. Disons de Monteverdi à Schubert. Il est centré sur le répertoire vocal.
Notre démarche est également pédagogique, vis-à-vis de nos publics, quel que soit leur âge. Nous accompagnons le plus souvent nos programmes d'actions pédagogiques: classes musicales, lectures, conférences, interventions des membres de l'Ensemble dans les classes, etc... Notre politique tarifaire, elle aussi, tient compte des différentes catégories de publics.

Notre Ensemble est très dynamique et c'est certainement ce qui me le rend le plus attachant. Nous avons peu de moyens mais nous ne manquons pas d'enthousiasme. L'Ensemble n'a pas perdu son âme au fil des années. Nous sommes tous issus des Conservatoires de Lyon, Paris et Genève et sommes tous venus avec la même exigence individuelle artistique et le même désir de travailler ensemble. Nous nous connaissons bien et donc la vie de l'Ensemble est très sympathique, chaleureuse, même. Les musiciens sont intégrés au conseil d'administration, ce qui marque l' attachement de tous à la vie de l'Ensemble.

Et vous-même, quel est votre parcours?
J'ai travaillé dans la maison d'opéra à Nantes, comme responsable musical, avant de créer la saison de l'Hostel Dieu.
Ce qui me passionne dans mon métier est de faire naître des partenariats sur des intérêts artistiques qui peuvent paraître très éloignés aux premiers contacts, mais qui s'avèrent d'une infinie richesse quand les relations s'approfondissent. Nous sommes proches de l'Ensemble Asmara, qui développe la même exigence d'authenticité dans la musique orientale, et plus particulièrement la musique ottomane du 18e siècle que le Concert de l'Hostel Dieu dans la musique occidentale. Nous avons donné Zaïde de Mozart ponctué par des intermèdes musicaux interprétés par Asmara. Les Canticas de Santa Maria ont été une autre occasion de rencontre musicale entre l'Orient et l'Occident.

Avec la compagnie Ardente Sole, qui travaille sur le répertoire baroque, nous avons un projet de ballet et d'une version de concert des Indes Galantes de Jean-Philippe Rameau. Il sera à notre programme de la prochaine saison, les 29 et 30 mai 2001, à la Chapelle de la Trinité à Lyon. Nous choisissons toujours nos partenariats avec des structures qui soient stimulantes pour nos musiciens. Nous travaillons avec le centre de formation lyrique de l'Opéra de Paris, qui forme les solistes de demain, comme avec la maîtrise de l'Opéra de Lyon d'où sortiront les choristes de demain.
Nous nous accordons une totale liberté de choix dans nos partenariats.
Nous avons en projet, à la demande de la ville de Lyon, dans le cadre des jumelages, un échange avec un ensemble de Birmingham et un concert commun en 2003. Pour la seconde année consécutive, le musée Gadagne accueille les conférences qui précédent nos concerts lyonnais. Nous sommes en relation avec le centre de musique baroque de Versailles, aussi, ainsi que ces bibliothèques et centres de recherche en musicologie.

Les partenariats les plus importants sont, sans doute, ceux que nous tissons avec les festivals. Au-delà de la diffusion pure, nous nous y impliquons en y réalisant un travail de fond avec les publics. C'est, notamment, le cas avec le festival Bach de Saint-Donat, où nous sommes en résidence depuis trois ans. Durant l'année scolaire nous intervenons, dans toute la Drôme, dans les classes: une classe de seconde, option audio-visuelle d'un lycée de Valence a réalisé un travail vidéo sur l'Ensemble, nous nous produisons à la bibliothèque de Montélimar, etc…
Tous ces partenariats favorisent, bien sûr, les croisement s de publics, ce qui est une autre préoccupation de l'Ensemble.
Nous éditons régulièrement des disques depuis peu, depuis 1998, en fait.
Notre politique éditoriale se concentre sur des compositeurs méconnus, d'une part parce que nous ne subissons aucune pression de la part des grandes maisons de disques, les "majors", et d'autre part pour continuer à progresser dans notre travail de découverte du répertoire baroque.

Où vous produisez-vous cet été?
Cet été sera très laborieux puisque de juin à septembre nous donnerons quarante concerts sur huit programmes différents.
Deux grandes tendances s'en dégagent.
En premier lieu, puisque nous célébrons cette année les deux cent cinquante ans de la mort de J.-S. Bach, nombre de ses pièces seront au répertoire. Nous les donnerons dans des églises principalement, comme le Magnificat, Cantate BWV 21 à la Basilique de Vézelay le 15 août à 21 h. Certaines se dérouleront en plein air et seront dansées, comme les Suites d'orchestre, lors de la fête baroque donnée dans le château de Bussy-Rabutin, en Côte d'Or, le 1er août à 20 h 30, avec la compagnie Ardente Sole. "La petite chronique de Jean-Sébastien Bach" proposera des extraits des cantates BWV 82, 209, 51 et 202, lors d'une soirée baroque, le 29 juillet à partir de 19 h 30, sur le parvis de la collégiale de St-Donat, dans la Drôme. Elle associera notre Ensemble, un comédien, Alain Carré, et la chorégraphe et danseuse de la compagnie Ardente Sole, Romana Agnel.

Nous ne nous consacrerons cependant pas seulement à Bach. Nous serons à Toulon et Saint-Raphaël, en co-production avec les jeunes chanteurs de l'Opéra de Paris, pour Cosi fan tutte de W.-A. Mozart. A Saint-Guilhem-le-Désert, dans l'Hérault, nous jouerons de la musique napolitaine. Dans le Jura, à Jigny, église-mère de Cluny, nous interpréterons le Stabat Mater de G. Pergolèse.
En fin d'été nous donnerons des cantates amoureuses au Parc Floral de Paris, avant de parcourir la Drôme pour un circuit musical à l'occasion des Journées du Patrimoine.

Pour en savoir plus
sur le programme estival
sur la saison 2000-2001
Contactez Le Concert de l'Hostel Dieu: tél.: 04 78 42 84 03, fax: 04 78 42 27 76

Discographie
Alceste / G.-F. Haendel – Absalon / distribution Média 7 ( 4 f Télérama, mai 1998)
Leçons de ténèbres / J.-B. Gouffet – Pierre Vérany / distribution Concorde (4 f Télérama, avril 1999)
Sibaris / J.-P. Rameau – Pierre Vérany / distribution Concorde