Suite pour arbres

Par Virginie Poitrasson

A l'abri en arbre irradie, je poursuis, catalogue de l'âme, au choix des feuilles, en orange aujourd'hui,
un peu de jaune par ici, mais surtout la palpe,
la palpable circonférence, dans la gravité du velours, dans ces circonstances soufflées et je branche au ciel, débranche ma commune démesure au monde,
enrobe d'ici et d'ailleurs, par ailleurs, par delà, au travers d'un trou si fort, oui j'aspire.

Vite, au dépourvu, peut-être au miracle en tout cas c'est arraché et pour sûr en douleur, les myriades déployées, et juste la branche ramenée en cercle, autour de soi, et cette ronde des regards, j'absorbe le monde, absorbée par trop ridée, comme étouffée, iris souligné, j'inonde mes mains en proie dangereuse, plus de miroitements en dedans.

Oh oui, oh oui, oh oui, ça éclot, en tripot, en rigoles et ça s'écarte, ça dégouline, ravine et c'est profond en silence, fripé d'indifférence et pourtant chatoyant, pentu dans la tête, ramené au peu, dans une invraisemblance du jeté, du parcouru et si têtu à rabattre jamais son clapet, clapotis en creux et la zizique qui tourne en arrêts, incidents d'écorce.

Bon, puisqu'il faut, mettons en, y les dents, à l'arrachée, au touffu bouleversement des couronnes qui trônaient là, miroitantes rasades, le sel en bouche, à glacer l'échine du troupeau, peut-être en frayeur, il faut y aller, s'y ajouter en infime, et tournoyante en sinuosités, armées de toutes ces chevelures décrépies, crépaillantes d'arrosoirs, ardues au tendre et qui s'apprennent et se lâchent au loin.

Ça c'est en géométrie, en gravure du ciel, en épicée texture, j'y accorde tous mes sacrifices, en inclinaisons trop peu nocturnes, comment les désaccords s'arrogent l'orée au dense et non plus la pauvreté qui redouble en sursauts, pas de cette cadence fraternelle où les pieds trépignent, bon bondir en ut en ir, sifflées grésillantes couvertures des feuilles, c'est en elles que je m'y accorde.

Attrapé, y voilà votre sort en lignées, au-dessus et j'y rattrape en tout, déclinaisons des sois, du doux et vasques empreintées, au défilé ombré de la marge, ne pas s'y enfiler, toujours errer en irradiation éhontée, comme bues et gloup rebues, arcadie en danse, saccade en y pleuvant quelques misères de frêles, en ivoire pétales dénombrées et cinglées.

Palpiter, piailler piégés en cercle, qu'à rassembler au bas d'en bas les choses, j'en peu dispose, ici on s'repose paraît-il que ça trépigne encore bon en large portée chahutée de la lumière, n'y garder que sa trace féconde des bras, palmures emplumées que l'on capture, rigoles sourdes de l'escorte fêlure, grosses encablures de sinistres épisodes, comme je mesure une portée au vaste, en si d'effet et trop clos.

Ramifissure, alambiquée ici bon d'accord, j'y assure calandre et baromètres d'azur, gravelures de la corde, et j'arrondis tout en peu, sacrifices de mes jonctions et on part en conjonctures dévoyées dans une nature, ça produit, pustule, pistule flamboyante et un fil qui s'embobine, emballé par les vents du profond, n'en garder qu'à raconter de l'effet emporté.

Habit en arbre, ça vit et cabre, rame, ramifier en décombres, et souligner le noir éparpillé dessus salubre poussiéreuse époustouflée qui bouscule son savoir un peu des choses, gravitant à l'alentour noctambule des cendres laissées et on rame ramène en chœur riantes particules, bulles au temps, qui aiment une pâle rayure de sa propre éclaboussure en si réel, en si réel.

 

Virginie Poitrasson (née en 1975)
Diplômée en lettres, elle a écrit un essai sur le poète Roger Kowalski, et achève une recherche universitaire sur Valère Novarina. En 1998, elle a collaboré à un ouvrage collectif de l'URDLA (centre international de l'estampe), XX primeur, consacré a la gravure contemporaine. Elle a conçu une installation avec des poèmes extraits de son recueil Au loin demeure et des dessins `a l'encre d'Ambre à la galerie Artemus à Lyon en décembre 1998. Elle a participé à la Nuit de la poésie à Vénissieux dans le cadre du festival Parole Ambulante en octobre 1999. Avec le collectif Sauf indication contraire, elle a organisé des lectures poétiques en musique dans des bars.

Elle publie régulièrement dans les revues Verso, Poésie-rencontres, Le Foudulire, Plum'art. Et toujours la terre son dernier recueil est accompagné de peintures d'Ambre. Parallèlement à la poésie, elle collabore à des journaux. Elle a été responsable de la rubrique culturelle de la revue bimestrielle Regard sur l'Est  à Paris pendant deux ans. Elle a également rédigé des articles pour le guide culturel Rhône-Alpes UTOPIA (édition 2000). Enfin, avec Annabelle Noir-Mezeray, elle a conçu "Pierres flottantes" une installation en plein air, au Festival des Dindes Folles en juin 2000. En août 2000 elle est partie à la Nouvelle-Orleans pour enseigner le français et finir ses études. La voici à New York depuis juin 2001. Elle travaille actuellement sur un nouveau corpus de textes "Emergency" et sur une installation de photos et de poèmes "Suite pour Arbres".

Virginie Poitrasson (Ph.: DR)