Jean -Marc Cerino
Entre visible et invisible.

par Isabelle d'Assignies

Jean -Marc Cerino, né en 1965, vit et travaille à Saint-Etienne.
J.M. Cerino est peintre. Depuis plusieurs années, son travail s'organise autour de différentes séries: Mendiants, Déportés, Tavailleurs immigrés, Grévistes, Justine aux masques...
Ses peintures sont figuratives et pourtant  presqu'abstraites.
Dans chacune de ses toiles , de grand formats, surgissent ou plutôt apparaissent des personnages. Un par toile,
en pied et de taille réelle. L'accrochage des tableaux étant très bas, à peine décollés du sol, nous nous retrouvons dans un face à face avec ces personnages. Nous sommes en face d'eux et pourtant notre perception est troublée.
Les personnages sont là tout en n'y étant pas: ils sont là puisque représentés très précisément, mais ils sont  également ailleurs - monochromes, personnages blancs sur une toile blanche, sur des murs blancs...  presqu'abstaits.


Apparitions?  Disparitions?
Jean-Marc Cerino travaille avec de la cire blanche, en couches successives, recouvrant le dessin de la figure sur la toile. Dans ce travail du blanc sur blanc, dans le ton sur ton , Jean-Marc Cerino nous propose des images silencieuses,
qui font partager au spectateur la sensation de perte .Le spectateur est placé lui même en situation de "perte visuelle, par une mise à l'épreuve de l'œil et de la perception même" (J.M.Cerino)
Les tableaux de J.M.Cerino font appel aux différents niveaux de perception physique, ,sensible, intellectuel, voir spirituel. Et se  pose, à travers ces œuvres , la  question de la responsabilité morale de l'artiste. Jean-Marc Cerino a une éthique, ses choix de sujets sont graves: :mendiants, déportés, travailleurs immigrés...
Même lorsqu'il explore d'autres domaines (vidéo, performance, photographie, sculpture, vitraux ) il reste fidèle à cette gravité dont son œuvre est empreinte, comme dans cette pièce récente où un crâne en résine repose sur un trépied, vanité contemporaine .

Et pourtant l'œuvre de J.M.Cerino est pas de l'ordre de la compassion.
J.M.Cerino: "Je souhaite rendre par la peinture une dignité aux êtres. Cette notion de perte, à l'œuvre dans ces toiles ,a induit très fortement une conscience du devoir de mémoire, se souvenir de ce qui est en train de se perdre. "

Outre les œuvres peintes à la cire blanche où les personnages sont noyés dans le blanc lumineux de la cire, J.M.Cerino a installé ses figures blanches et transparentes sur des voiles de tissu blanc transparent.
(exposition: "Savoir c'est se souvenir." Création textile - Musée de Bourgoin-Jallieu.Novembre 2000-Mars 2001 ) ainsi que dans des sérigraphies sur verre.
Ce sont d'ailleurs deux pièces issues de ce travail de sérigraphie sur verre: Posture de mendiant qui seront présentées, avec le soutien de Crestet, à l'Eglise de Piolenc, pour les Journées du Patrimoine, les 21 et 22 Septembre
Il faut voir réellement ces œuvres. Elles s'éprouvent comme des "apparitions", leur perception variant selon la position du spectateur.
Entre visible et invisible.

Jean-Marc Cerino est représenté par la galerie Carousel à Paris
Cahiers Intempestifs n°7, Passages 1 - 2 -3  . Ed.Printer, 2000
1/"2001 (Justine à Mexico)", encaustique sur toile, 148x65 cm, 2001.
(Photo : Laurent Cerino)
2/Vue de l'exposition : "Savoir, c'est se souvenir", création textile, Musée de Bourgoin-Jallieu, 14/11/ 2000 – 11/03/2001. (Photo : Laurent Cerino)
3/"Mesure du monde",Crâne en résine et pied de géomètre, 157x30x30 cm, 2001.
(Photo : Yves Bresson)