Des girouettes dans le vent Par Martine Gayot
Le musée de Charlieu expose tout l'été 120 girouettes de toutes époques. Debout sur les toits elles disaient la direction du vent, mais bien autre chose encore. Un art populaire à sauver. Livrée à la danse du vent la girouette, par définition, oscille et change de cap au premier souffle contraire, à tel point que dans le langage courant elle symbolise un
esprit fort influençable. Cet objet au faîte du toit signifie pourtant beaucoup de fierté, et signe l'identité du propriétaire. Son ancêtre est la bannière du
Moyen-Age qui, victorieuse au combat, était hissée sur le toit. Harcelé par le vent le tissu fût remplacé par une forme en métal qui reprenait le dessin des
bannières, des étendards, des pennons et des armoiries des chevaliers. A la renaissance elle afficha des dragons, des hures et des gueules béantes pour
affirmer la force et la puissance. Ce privilège d'aristocrate de planter des girouettes est aboli en 1791. Dès lors "il est libre à chacun d'en placer à son
gré et dans la forme qu'il jugera à propos ". Ce dont personne ne se prive. Commence alors l'ère de la girouette populaire, un art nouveau qui va faire
travailler le ferblantier, le forgeron et le maréchal-ferrant. Ils vont faire naître à la demande toutes sortes de girouettes figuratives, réalistes ou oniriques.  On reprend aux grands de ce monde l'image des dragons bienfaisants et protecteurs de la maison.
On rend hommage aux astres, au soleil, roi du cosmos à l'époque, à la lune qui rythme la nature et, montrée en croissant horizontal, rappelle qu'il y a eu un croisé dans la famille. On se souvient des dieux les plus
populaires, de Bacchus souvent représenté assis sur son tonneau, de Pégase le cheval ailé. Les amours et les trompettes de la renommée claironnent sur les toits.
Peu à peu l'idée de propriété s'estompe pour laisser place à celle d'une activité. L'agriculteur choisit une scène de labour, symbole de son métier. Le
tonnelier, le sabotier, le forgeron, le charron, l'écrivain public, le colporteur enfin établi se signalent ainsi de belle façon. On aime les animaux. On prend la
force du lion, la prospérité du cochon, la fierté du coq, qui se retrouve en haut de tous les clochers pour obéir au pape. L'imagination est sans limite. On voit
Pierrot au clair de la lune, Guillaume Tell, son fils et sa pomme, des pauvres gens qui luttent contre la tempête. Encore plus dans le vent, la girouette se fait
amie du Progrès. Bicyclettes, locomotives, avions traversent les nuées nez au vent. Les 120 girouettes présentées ici font partie de la plus belle collection française privée. La plus ancienne est du XIVe
siècle. Les plus récentes du XXe siècle. Elles sont en fer forgé, en fer blanc, en zinc, en cuivre, en laiton, peintes ou non. Elles sont parfois récupérées in extremis, rouillées, trouées de
balles de chasseurs. Cette exposition veut, en plus de notre plaisir, faire prendre conscience à tous de ce patrimoine poétique qu'il convient de sauvegarder, et pourquoi pas de perpétue. Jusqu'au 30 novembre au Musée de Charlieu 9 boulevard Général Leclerc, 42190 Charlieu Tel : 04 77 60 28 84 Tous les jours de 10h à 19h jusqu'au 15 septembre
puis de 14h à 18h sauf le lundi. Photo n°1 : un toit de Charlieu bien pourvu en girouettes et devenu le symbole de l'exposition Photo n°2 : Tête de loup - XIXème siècle Moulins (Allier) |