La sage folie de Benabar

Par Christian Soleil.

Bénabar, ça rime avec Carambar, Malabar,
Barbara ou Babar. Et il y a un peu de tout cela dans ce petit rital bondissant, mi-Monsieur 100 000 volts, mi-fou chantant: un zeste d'enfance qui ne passe pas, un beau brin d'intelligence et de poésie dans les textes, une sensibilité à fleur de peau mais bien maîtrisée, le tout servi avec une sauce jazzy, une atmosphère de troubadours et un tempérament de fou du roi.
C'est dire que Bénabar concentre une personnalité complète, apte à électrifier, ce lundi 10 mai 2004, un Palais des Spectacles stéphanois plein à craquer d'une jeunesse debout.
Car c'est pour un public debout que Bénabar chante, pas pour celui des fauteuils profonds de théâtres rouge et or. Son spectacle exige une attention de chaque instant. Attention pour décrypter, faute d'une sono à la hauteur, les syllabes qui tombent de ses lèvres. Attention pour suivre les pas de l'étrange danse primitive à laquelle il s'adonne, plié à 90°, les bras le long des jambes, les doigts écartelés. Attention pour saisir, derrière les mots simples du quotidien, la poésie discrète et souvent insolente.

Bénabar pourrait comme Nougaro être un danseur contrarié par l'interdit paternel. Il y a dans ce petit taureau toute la féminité d'un Picasso dont Cocteau disait qu'il était un ménage à lui tout seul. S'il se prétend, sur scène, et pour rire, de la secte des Raëliens, il n'en est pas moins un être abouti, complet, entier. Il peut se moquer de tous et de tout. C'est toujours avec la tendre bienveillance des attentifs. Il assume tout: la France et ses contradictions, la famille italienne et ses ennuyeux repas du dimanche, Jésus de Nazareth et Claude de Boulogne-Billancourt, les amours contrariés, les réflexes ataviques du macho, et la sensibilité féminine qui lui fait endosser, le temps d'une chanson, la personnalité de la fille moche et trop souvent, mais trop mal baisée, ou reprendre, pour le n-ième rappel d'une salle chauffée à blanc, la première chanson de Barbara : "Dis, quand reviendras-tu ?"
C'est sans doute là qu'il faut aller chercher ses origines. Chez Barbara. Un nom qui remonte de l'enfance ; un piano pour vaisseau ; une démarche toute personnelle ; l'éternité de ces petits riens qui font les tragédies des grandes chansons. Bénabar, l'homme qui chante. Sa plus belle histoire d'amour, c'est nous.

18/07 au Château des Adhémar  - Montélimar (26)
24/07 au Théâtre de Verdure – Aix-les-Bains (73)
28/07 – Théâtre de Fourvière – Lyon
http://www.nuits-de-fourviere.org/
Ph. : ©DR