Nan Golding
Sœurs, saintes et sybilles

Par Catherine Ferey

Sainte Barbe, Barbara et Nan
L'hôpital de la Salpêtrière est un des hauts lieux du "grand enfermement" sous l'ancien régime. Jusqu'à 8000 femmes y ont été enfermées en même temps, maltraitées, malnutries, soumises au travail forcé jusqu'à l'épuisement. Tous les matins, elles étaient rassemblées dans la chapelle Saint-Louis,
pour suivre le premier office.
La rédemption par la prière et le travail, telle était le traitement qui était réservé à ces femmes prostituées, voleuses, mendiantes, homosexuelles, adultères, criminelles, des femmes rebelles à l'ordre social ou simplement coupables d'en être les victimes.

Dans cette chapelle Saint-Louis, Nan Golding a choisi de nous raconter une histoire de sœurs, saintes et sybilles de 35 minutes sur trois écrans et une installation. L'histoire de trois femmes rebelles "qui refusent de suivre les règles, ne se soumettent pas au rôle traditionnel de la femme". Le principe de l'œuvre est simple, les trois récits suivent, dans un ordre chronologique. Entre des extraits de musique et des chansons, la voix de Nan Golding résonne dans le grand espace vide de la chapelle, pendant que des images défilent, fixes ou animées, en noir et blanc ou en couleurs.
La première rebelle est Sainte Barbe. Elle refuse les prétendants que lui présente son père, elle refuse d'abjurer sa foi dans le Christ, à qui elle a librement décidé de vouer sa vie. Elle en mourra, de la main même de son père.
La seconde rebelle est Barbara Goldin, la sœur aînée de Nan. Enfermée dans un hôpital psychiatrique dès l'âge de 14 ans, elle se jettera sou un train à 18 ans, un jour de sortie.

La troisième rebelle est Nan Golding elle-même lors de ses deux séjours en hôpital psychiatrique à Londres, en 2002 "le premier pour échapper au piège de la toxicomanie, le second pour me protéger de ma dépression".
"Pour moi, la photographie est le contraire du détachement. C'est une façon de toucher l'autre: c'est une caresse." Assurément, ce travail de Nan Goldin touche, il émeut, il bouleverse parce que Nan nous regarde en face du fauteuil de sa chambre d'hôpital, où elle allume cigarette après cigarette, parce que les mots révèlent ce que le sourire éclatant, répété immuablement sur toutes les photographies de sa sœur Barbara,  nous cache.
Il détourne les apparences pour nous mettre devant une autre réalité, une réalité psychologique. "Ce travail n'aura rien d'un documentaire, mais nous l'espérons, touchera viscéralement le public en l'intégrant physiquement".

Sœurs, saintes et sybilles est une commande publique du ministère de la culture et de la communication (délégation aux arts plastiques et centre national des arts plastiques) et du Festival d'Automne à Paris.
Chapelle Saint-Louis de la Salpêtrière – Hôpital de la Salpêtrière

Du 16 septembre au 01 novembre 2004
du lundi au samedi : 10h30 -15h / 16h – 18h30 et dimanche : 10h30 – 15h
Entrée libre
Ph. : ©DR