Marie Morel & les images amoureuses
Par Jean-Paul Gavard-Perret "Comment te dire que je t'aime?" Tenter de s'approcher de l'œuvre de Marie Morel n'est pas essayer de mettre
d'y l'ordre, c'est glisser dans les images faussement naïves mais tendres où remonte une histoire faite de failles mais, en particulier dans ces œuvres récentes, de présence obstinée.
Une telle figuration fait deviner l'annonce d'un Eden toujours possible mais elle désigne et dessine aussi l'écart qui nous en sépare. L'ouverture est donc de
l'ordre de l'esquisse autour de laquelle louvoie une forme de discrète volupté drapée de rose et de bleu pâles. Une telle figuration échappe à une similitude,
à une ressemblance au moment où pourtant la peinture demeure proche d'une proximité. L'artiste crée ainsi des abîmes par le compact et le fragment, elle
fomente la dispersion et l'ordre pour maintenir le mystère de ce qu'il en est de l'amour symbolisé dans une des toiles par deux pigeons aux ailes déployées.
Mais on en saura pas plus. Tout se situe toujours à la frontière, tout est une histoire de peau et de plumes.  Entre leurs zones neigeuses ou épaisses demeurent l'épars et l'homogène, le flux persistant, la dispersion insistante. Ainsi l'image fait fondre les ressemblances
classiques et appelle à celles que nous ne reconnaissons pas encore. Reste donc un seuil d'égarement, une errance car en un tel jeu de formes surgissent des équivalences existentielles
mais de ce qui n'est que suggéré et qui nous échappe. Marie Morel crée donc un espace absolument optique pour la confection d'images "amoureuses" mais dont le code symbolique ne renvoie
plus à la vulgate apprise qu'elles semblent pourtant apprivoiser. A nous alors de forger notre religion de l'amour, à nous de répondre à la question : "et
vous, vous savez ce qu'il en est de l'amour?". A nous de réorganiser nos propres images mentales, de comprendre de quoi elles son faites (douleur et
joie, perte et espoir). C'est pourquoi dans leur simplicité, dans leur silence les œuvres de Marie Morel une fois de plus nous appellent de l'intérieur au
moment où l'on se trouve plus proche d'une sorte de " vérité " de la représentation dans laquelle les notions d'intérieur et d'extérieur perdent leur
sens. Car soudain une possible conversion est possible à qui veut faire l'effort de plonger dans de tels miroirs de fusion : en leur sein, même lorsque les
matières sont visibles, c'est la présence d'un ineffable qui parle et - qui-sait? - nous caresse un peu. Marie Morel - Peintures récentes /
Du 25/11/2004 au 24/12/2004
Galerie Béatrice Soulié : 21 rue Guénégaud - 75006 Paris Tel : 01 43 54 57 01
http://www.galerie-beatrice-soulie.com 18/12 de 14h à 19h : Tombola et signature de l'ouvrage
"Marie Morel, peintre" aux éditions YMNA Ph. : ©DR |