Salut à Maurice Deschamps

par Yves Neyrolles

Ça tombe comme ça, les bonnes nouvelles comme celles qui soudain vous affligent.
Là, c'est une affligeante chose que m'apprend Christian Taponard, un mauvais lever de rideau sur la nouvelle saison du Théâtre des Célestins.
J'entre dans ce lieu, magnifié par sa restauration récente, pour la conférence de presse consacrée à l'annonce du programme de la nouvelle saison.
Je rencontre Christian Taponard, qui présentera ici un spectacle sur lequel j'aurai à revenir et qui,
comme beaucoup d'autres, comme tous en vérité,
va marquer fortement la nouvelle saison intra muros de ce Théâtre.

Question de Christian: "Tu connaissais Maurice Deschamps?"
Moi: "Pourquoi "connaissais"?", voulant retarder la phrase fatidique, car j'ai aussitôt compris: Maurice Deschamps, comédien que j'ai vu, dans les années 60, accomplir ses grands débuts sur la scène du Théâtre de la Cité de Villeurbanne, au milieu de la troupe de Roger Planchon, que j'ai adoré dans le rôle de Galilée, qu'il tenait sous la direction de Philippe Delaigue, aux côtés d'Alain Bert et de Christian Taponard – et je me rends compte à présent que cette mise en scène à la Comédie de Valence remonte à plusieurs années et que, depuis, je ne l'ai pas revu, ni au théâtre où il a naturellement créé d'autres personnages, ni dans la vie -, Maurice Deschamps, vrai homme de théâtre, vrai homme tout court, n'est plus, ne sera plus présent devant nous pour nous émouvoir, nous faire sourire et rire, trembler d'effroi ou de joie à cause de ce talent immense qu'il pouvait montrer en passant d'un rôle à un autre.
Maurice, inoubliable modulation de la voix, Maurice-le-courage qui, malgré une déficience visuelle l'ayant rendu pratiquement aveugle, poursuivait sa route de lumière sur la scène, faisait vie sur la scène, n'est plus.
Salut à toi, ami.

Ph. : Maurice Deschamps © Théâtres des Célestins / DR